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Photo du rédacteurSandra Muller

Debranding : en quête perpétuelle de nouveauté ou en détestation du changement ?

Lorsqu’on est dans le domaine du design ou de la communication, on voit tous les ans des personnes s’insurger à chaque fois qu’une marque fait un rebranding de son logo. “C’était mieux avant”, “Quelle horreur”, “On ne reconnaît plus la marque”, je vous passe les études détaillées des experts et les montages potaches. J’ai pourtant l’impression que nous sommes toutes et tous à la recherche de la nouveauté quand il est question de création visuelle. Toujours à la recherche de nouveauté et intransigeants au moindre changement : Qu’est-ce qui fait que nous soyons à ce point coincés dans cette contradiction ?





Un mécanisme de survie


Oui, les humains sont indécrottables, nous avons naturellement tendance à préférer ce qui nous est familier. C’est un mécanisme de survie. L’inconnu est par nature imprévisible et donc un danger potentiel. Plusieurs psychologues comme Kurt Lewin ont étudié la question. Notre résistance au changement est un mécanisme de défense psychologique qui est encore très présent aujourd’hui, même si l’imprévisible n’est plus aussi dangereux que pour nos ancêtres les Pierrafeu.


Il y a également des recherches en neurosciences qui montrent que se confronter à une nouvelle situation ou à un changement demande plus d’énergie à notre cerveau. Voilà, notre gros cerveau de sapiens est flemmard.


Surprends-moi !


D’un autre côté, on se lasse facilement. Les fins stratèges du monde de la publicité nous ont bien cernés, notre capacité d’attention est de plus en plus courte d’une génération à l’autre, nous nous lassons très vite, et notre temps de cerveau est devenu une ressource à part entière. Le premier à avoir utilisé la psychologie à des fins marketing s’appelle Edward Bernays. Si le sujet vous intéresse, je vous conseille de lire “Propaganda : Comment manipuler l'opinion en démocratie”, c'est édifiant. Donc, si je devais résumer, d’un point de vue comportemental et psychologique, nous cherchons la nouveauté de façon perpétuelle, mais si on nous l’impose, nous détestons. De vrais rabat-joies, ces humains !


Évidemment, les marques nous connaissent et sont très au fait de nos terribles contradictions : elles font appel à des consultants en neuromarketing pour les accompagner dans leur difficile choix de rebranding, et derrière, il y a des raisons à ces changements. C’est là où je vous parle du débranding, vous allez voir que cela répond à la fois à notre peur du changement et à notre besoin de nouveauté.


Le debranding


Il y a une mouvance très claire ces dernières années qui dure et pour une raison. On l’appelle le débranding. C’est le fait de simplifier et d’épurer un logo (ou une charte graphique dans son entier) pour lui donner un coup de neuf. les éléments iconographiques sont simplifiés, vectorisés ou disparaissent, les empattements et autres éléments singuliers disparaissent des typographies, les palettes de couleurs se réduisent. Beaucoup de marques que vous connaissez sont passés par là : Nike, Burger king, Pepsi, Mastercard, ...


Il faut comprendre que les tendances sont foncièrement dépendantes de la technologie contemporaine : les années 90 ont vu émerger beaucoup de logos avec des dégradés, des effets biseautés et des ombres portées, tout simplement parce que grâce à l’ordinateur et à la démocratisation de son utilisation dans le domaine du graphisme, nous pouvions le faire. Et si on peut le faire, pourquoi s’en priver ?


Aujourd’hui, si la tendance s’inverse et que l’on cherche des lignes sobres, des aplats nets et des typographies sans serif, c’est aussi en raison de la technologie : les marques souhaitent être flexibles, s’adapter à tous les supports de communication, print, web, télé, réseaux sociaux. Et en particulier être “mobile-first”. Pour être vu et être plus lisible sur un écran de portable, il vaut mieux un logo simple, aux lignes impactantes, et une typographie sans serif. Adieu l’extravagance des années 90.


Il y a aussi la volonté de durer dans le temps et de refaire moins souvent son branding. Cela implique donc de prendre moins de risques, d’avoir une communication plus sobre, qui pourra s’adapter au fil des années. Il y a l’envie d’être intemporel.


Ainsi, on répond à la fois à un besoin de continuité et d’identité familière pour nos réflexes cognitifs qui ne supportent pas le changement, et à la fois à notre besoin de nouveauté.


On vit également une tendance à l’engagement. Les consommateurs ont changé. Ils sont moins enclins à embrasser la consommation de masse les yeux fermés et sont plus soucieux de ce qu’ils achètent et à qui ils achètent : les marques veulent aussi évoquer une certaine sobriété, leur sérieux et montrer qu’elles ont changé elles aussi.


Mais le débranding n’est pas sans risque et nous allons voir pourquoi.





Des marques qui reviennent en arrière


Parfois, on fait une erreur et il faut revenir en arrière. C’est ce que certaines marques ont fait. Tropicana a changé son packaging emblématique dans une démarche typique de débranding et, face à la chute de ses ventes, a repris son ancien design.


Entre 2018 et 2023, la marque Burberry a, dans un premier temps, débrandé son logo puis réintégré une typographie avec empattement et son ancien blason datant de 1901. Qu’est-ce qui justifie une telle inconstance dans l’identité d’une marque ? Eh bien, Burberry répond à une nouvelle attente.


Le débranding, c’est le risque d’une uniformisation. Sans une histoire de marque forte, sans storytelling singulier, la marque peut être tout simplement perdue dans un univers publicitaire où toutes les identités visuelles se ressemblent. Burberry renoue avec un élément de son histoire de marque remis au goût du jour et une typographie plus singulière dans un paysage publicitaire peuplé de sans serif bold.

Le but est de se démarquer. Et pour cause, c’est de plus en plus difficile en raison de la masse de publicités que nous voyons chaque jour.





Une nouvelle génération à la recherche d’authenticité


Nos espaces de sociabilisation et de divertissement sont devenus profondément numériques, à travers évidemment les réseaux sociaux, les plateformes de streaming et de live, ainsi que les contenus d’influenceurs et d'influenceuses. La présence de publicités dans ces espaces est omniprésente.


Les nouvelles générations sont particulièrement fatiguées de ce matraquage commercial et de ces identités visuelles aseptisées, trop léchées, trop parfaites. Plusieurs tendances assez importantes commencent à influencer le monde du branding, comme le mindful mess ou encore le mouvement Brats.


On y retrouve une esthétique de l’accumulation, du craft, de l’altérité, d'assumer ses défauts et d'en être fier, d'accepter le trash et le vulgaire. On observe également un regain d’intérêt pour l’artisanat, la seconde main et le fait maison. Le besoin de se connecter avec des petites marques locales et des niches de tendances.


De quoi nourrir notre besoin de familiarité (consommer local ou fait maison) et notre besoin de nouveauté (découvrir de nouvelles petites tendances, un nouvel artisan).



 

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